En début d’année, le vendredi 6 janvier, j’ai participé à la réunion de restitution de l’évaluation des contributions de la France aux quatre institutions de la Francophonie : l’Agence universitaire de la francophonie (AUF), l’Association internationale des maires francophones (AIMF), l’Université Senghor et l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF), dont je suis membre en tant que président du groupe d’amitié France-Croatie.
(Document de synthèse consultable ici)
Il est toujours étonnant que l’on pose comme postulat qu’avoir une langue en partage -en l’occurrence le Français- engendre l’existence de valeurs communes. Cette affirmation, rappelée par la secrétaire d’Etat à la Francophonie, Madame Chrysoula Zacharopoulou, au début de la réunion, est plus un idéal qu’une réalité. Il n’est pas certain que beaucoup de locuteurs du français aient conscience de la diversité des cultures francophones. Chacun, bien sûr, s’attachant à la part qui est la sienne et à ce qu’il connait. Partager une langue permet d’échanger, mais cela permet-il toujours de se comprendre ? Nos connaissances réciproques sont parfois trop faibles, nos environnements trop différents pour engendrer une compréhension qui serait la source de ces « valeurs partagées ».
Pour ces raisons, parce que le centre de gravité de la francophonie est de plus en plus en Afrique, parce qu’il est illusoire de compter que « les liens historiques » perdurent d’une génération à l’autre, il est essentiel de permettre aux acteurs de la francophonie d’être engagé dans le monde éducatif et universitaire, d’être un outil d’échange et de coopération en matière de gestion municipale, si importante pour la vie quotidienne. Chacun des opérateurs de la francophonie, évalué lors de cette réunion, a un intérêt majeur pour l’avenir de celle-ci. Ces « valeurs partagées » ne sont pas un acquis éternel et universel. Fruits de rencontres, elles doivent s’entretenir. Les incompréhensions de plus en plus vives entre certains pays d’Afrique de l’Ouest et la France illustrent ce besoin. Besoin auquel les institutions de la francophonie doivent répondre.
L’évaluation et les recommandations remises lors de cette réunion appellent à plus de coordination et de cohérence entre les institutions aidées et l’action de la France. Mais, j’ai eu le sentiment que l’on n’élargissait pas notre regard et nos exigences à l’ensemble de l’horizon. Que les ambassades et les institutions aidées échangent mieux sur leurs projets et leurs objectifs, bien entendu. D’ailleurs c’est de plus en plus la réalité quand on voit que, sur six ans, la part de financements par projet est passée de 5,8% à plus de 17% de la contribution française (globalement annuellement stable et de 200 M€ sur six ans). Mais si l’on peut parler coordination et cohérence de la contribution française, il faut regarder au-delà de l’évaluation des actions du Quai d’Orsay et de l’AFD et oser évoquer les effets sur nos objectifs de l’ensemble des politiques françaises vis-à-vis des pays concernés et manière dont celles-ci sont perçues. Je pense ici aux conséquences des frais d’inscription pour les étudiants étrangers non-communautaires dans nos universités, mais surtout à notre politique de visa, de plus en plus difficile à suivre et à défendre, et qui constitue une fracture au cœur de la francophonie.